Diversité et égalité des chances

Plus de la moitié des habitants du département de Seine Saint-Denis est issue de l’immigration. Pour une entreprise, ne pas prendre en compte cette diversité, c’est ignorer la majorité des ressources humaines de son territoire.

Certaines entreprises vivent encore ce « défi » comme un risque. Mais, à ne pas s’ouvrir, ne prennent-elles pas le risque, de se couper de leurs clients qui ne se reconnaîtraient plus dans des équipes non représentatives des réalités du territoire ? La chambre de commerce et d’industrie de Paris Seine-Saint-Denis est un des principaux acteurs pour la promotion de l’égalité des chances et de la lutte contre les discriminations.

Interview

Danielle Dubrac, Vice-Présidente déléguée – CCIP 93

"Valoriser les bonnes pratiques"

Agir Mag. : Quelle sont vos actions contre la discrimination des jeunes à l'embauche?
Danielle Dubrac : Nous menons essentiellement deux types d'actions visant d'un côté à la sensibilisation des entreprises aux méfaits des discriminations à l'emploi, et de l'autre une incitation à recourir aux dispositifs de formation afin de faciliter l’intégration. L'objectif étant bien évidemment de valoriser les bonnes pratiques. Il s'agit de faire comprendre que toute discrimination n'est pas seulement contraire aux lois et à la morale, mais qu'elle est aussi contre-productive pour l'entreprise.

Agir Mag. : Que voulez-vous dire ?
D.D : Je suis syndic d'immeubles en Seine-Saint-Denis, avec une clientèle très diversifiée et des salariés qui sont à cette image. J'ai donc parmi mon personnel beaucoup de personnes étrangères, d'autres qui sont issues de l'immigration ou pas. Des origines diverses mais qui sont toutes rattachées à leur département et cette identité locale est un élément fondamental dans le fonctionnement de ma société. Quand j'ai affaire à des impayés par exemple, je cherche toujours des solutions à l'amiable plutôt que d'engager tout  de suite une procédure de contentieux. Et je m'aperçois que ce dialogue est beaucoup plus facile à mettre en oeuvre par l'intermédiaire de salariés qui connaissent d'autant mieux le milieu dans lequel ils travaillent qu'il fait partie de leur vie quotidienne. C'est un cas parmi tant d'autres pour dire qu'au-delà de la connaissance intellectuelle d'un travail, le milieu dans lequel il est exercé est fondamental pour la vie de l'entreprise.

Agir Mag. : Quels sont vos axes d’actions ?
D.D: Nous mettons en place des ateliers pour aider les entreprises à changer leurs méthodes de recrutement lorsque celles-ci sont justement discriminantes. Nous travaillons notamment à la promotion de l'école de la seconde chance auprès de nos 1200 adhérents pour favoriser l'insertion des jeunes sans diplômes, qui est l'une des causes principales de difficulté à accéder à l'emploi. De mon point de vue, il faut s'intéresser en priorité aux jeunes qui ont un niveau inférieur au Bac et qui sont aujourd'hui laissés sur le bord du chemin, notamment parce que beaucoup de chefs d'entreprises n'osent pas leur donner cette deuxième chance. La difficulté d'insertion n'est donc pas seulement au niveau du manque de diplôme, mais également pour beaucoup dans l'image des dirigeants vis à vis de ces jeunes en mal de formation.

Agir Mag. : Dans cette logique, êtes-vous favorable au CV anonyme?
D.D : D'un point de vue personnel, je ne pense pas qu'il faille chercher la solution au problème de discrimination à l'embauche de ce côté-là. Il faut surtout faire évoluer les esprits de certains employeurs qui sont encore réticents. En les persuadant qu'ils ont tout à gagner à se défaire des a priori empêchant aujourd'hui certains jeunes d’accéder à l'emploi. Ce qui signifie porter un autre regard sur des jeunes qui par ailleurs se montrent bien souvent plus combatifs et plus volontaires quand on leur donne enfin leur chance.